Un martyr vivant

Mon histoire est une odyssée de la haine vers l’amour. J’ai grandi au Soudan dans une communauté tribale; on nous appelait Bédouins, ces nomades qui font l’élevage et le commerce des chameaux. Nous formions une communauté musulmane aux convictions solides avec la simple croyance que chacun d’entre nous était né musulman. Il était attendu qu’à l’âge de six ans, chaque enfant se rendait dans la tente du leader religieux pour commencer à mémoriser le Coran à l’oral - toute la journée, tous les jours, jusqu’à ce qu’il le sache entièrement. Ce qui faisait de nous un peuple analphabète, puisque ni la lecture ni l’écriture n’étaient enseignées.

J’appartenais à une génération qui a vécu une importante transition vers la mentalité voulant que les enfants apprennent à lire et à écrire et que le seul moyen d’y parvenir était de les envoyer au pensionnat à la ville. Avant notre entrée à l’école, les anciens de la tribu ont tenté de nous expliquer ce qu’était une ville et de nous préparer à ce que nous verrions et à ce qui nous attendait. Parce que je n’ai été élevé qu’au désert, j’ignorais totalement à quoi ressemblait un bâtiment ou une voiture. Leur discours m’était incompréhensible. Tout ce que je comprenais, c’est que, selon eux, mon cœur allait être changé totalement et l’on me conduirait dans un endroit rempli de haine et de crainte, où j’allais prendre des décisions extrêmement mauvaises pour ma vie.

Les anciens nous disaient qu’un chrétien était « le feu alimentant l’enfer ». Leurs paroles exactes étaient « qu’il fallait les brûler avant qu’ils ne nous brûlent ». Il fallait les haïr et leur faire du mal avant qu’ils ne nous fassent du mal. Le Coran nous avait enseigné que les chrétiens et les juifs étaient comme des singes et des porcs et les anciens disaient des choses à leur endroit qui semblaient les rendre inhumains - si nous les touchions, par exemple, ils nous transmettraient du poison; si nous dormions dans le même lit qu’eux, ils nous transformeraient en âne durant la nuit. Ils dressaient d’eux un tel portrait, semblable à celui d’un extraterrestre, qui nous transmettait une haine profonde dans nos cœurs et dans nos pensées.

Les pensionnats au Soudan étaient des écoles publiques du gouvernement et il n’était pas facile d’y vivre, étant donné le climat très strict : la surpopulation estudiantine, où l’on était deux, parfois trois, à partager le même lit, et dix élèves autour d’un seul bol de nourriture, et le fait que l’on nous battait à la moindre offense, ont contribué à me voler mon enfance. Bien qu’il s’agissait d’une école musulmane, un petit nombre de chrétiens, sans autre endroit pour parfaire leur éducation, s’étaient retrouvés dans cet environnement hostile.

Cette école est le lieu où ma haine a trouvé refuge, et tristement, ces élèves sont devenus le centre où toutes les idées négatives qu’on m’avait enseignées à propos des chrétiens. Mon but était de rendre leur vie misérable et j’ai trouvé une foule de moyens d’y parvenir. Entre l’école primaire et le secondaire, j’ai été renvoyé de huit écoles différentes, tellement j’étais devenu une personne violente. Ce qui n’affectait pas mes résultats scolaires; j’avais de très bonnes notes et j’ai réussi l’examen d’admission à l’université.

Il s’agissait du seul endroit où tout le monde pouvait vraiment dire ce qu’il pensait de la politique, de la religion, etc. Dès que quelqu’un sortait du campus, il pouvait être arrêté pour avoir dit les mêmes paroles qu’à l’intérieur des murs de l’université. Ce qui permettait à bien des groupes d’être ouverts à propos de leurs croyances. Un de ces groupes était chrétien et l’autre était les Frères Musulmans. Dès mon entrée à l’université, je me suis joint naturellement à ce dernier, dont le but principal était de protéger l’Islam. Bien des adeptes de ce groupe n’avaient aucune connaissance du Coran, mais à cause de l’histoire de ma famille, j’avais entièrement mémorisé le Coran et je suis devenu très vite un leader parmi ce groupe. Les Frères Musulmans est une organisation fondamentaliste mondiale et mon implication en son sein allait me conduire à des moments pénibles et déplorables de ma vie.

Le groupe chrétien était très extraverti à propos de sa foi et parmi ces gens, un jeune homme semblait avoir le fardeau de me témoigner. Chaque fois qu’il s’approchait de moi, je le frappais. Et pourtant, il persistait. Je ne pouvais pas croire qu’il continuait à venir vers moi pour subir le même sort, de nombreuses fois. Au cours de ma seconde année d’étude, les chrétiens ont fait venir un prédicateur dont la présentation s’intitulait « La Bible est-elle la parole de Dieu? » Un si grand nombre de personnes s’y étaient inscrites que les Frères Musulmans sont devenus préoccupés et se sont mis en colère.

Nous avons eu une rencontre pour discuter d’une façon d’empêcher cet événement et il a été décidé qu’un des chrétiens devait être tué. Tristement, j’ai été choisi pour faire cette malheureuse besogne. Deux de mes coreligionnaires et moi avons choisi d’exécuter notre dessein dans la pénombre, mais nous avons attaqué la mauvaise personne. Notre victime était en fait un musulman et non un chrétien, qui a été ainsi battu et qui est devenu paraplégique pour la vie. Je suis demeuré auprès des Frères Musulmans tout au long de mes études universitaires, mais ma crainte d’être découvert pour ce crime et ainsi entraver mes études m’a empêché de perpétrer tout acte violent jusqu’à la fin de mes études.

Toujours un fidèle musulman, j’ai obtenu mon diplôme et j’ai commencé à travailler comme comptable dans une entreprise française. Un jour j’ai goûté accidentellement à un verre d’alcool au cours d’une fête de la compagnie et cela m’a valu d’être battu par mes « frères » musulmans à la mosquée. J’ai dû passer quarante jours sans prières, sans Coran et sans prononcer le nom d’Allah. Ce qui m’a amené à explorer les choses de ce monde auxquelles je n’avais jamais songé auparavant, dans ma passion d’être musulman. J’étais maintenant attiré par la « vie de la ville » et pourtant, j’étais en proie à de terribles remords.

D’une manière incroyable, quelqu’un s’est présenté à mon lieu de travail et m’a fait demander. C’était ce chrétien de l’université que j’avais frappé tant de fois. Il voulait encore me parler de Christ. Cette fois, il parlait du pardon. J’étais très intéressé. Au cours des mois suivants, j’ai commencé à voir que Dieu dirigeait mes pas. Cependant, le plus grand geste de Dieu a été de me conduire vers une femme à la foi inébranlable et une histoire qui m’a fait mettre à genoux pour recevoir Jésus dans mon cœur.

Elle était devenue chrétienne à l’adolescence et lorsque les membres de sa tribu l’avaient découvert, ils avaient tenté de la brûler vive. Elle avait été secourue par un médecin chrétien qui visitait cette tribu et elle s’en était tirée avec de sévères douleurs aux jambes. Lorsque je l’ai rencontrée, j’ai vu la lumière de Jésus dans ses yeux. Lorsqu’elle a retiré la couverture recouvrant ses jambes pour me les montrer, la seule chose que je puis dire, c’est que Dieu a parlé à mon cœur à ce moment-là.

Dès que ma famille a appris que j’étais devenu chrétien, j’ai été aussitôt arrêté et violemment battu, et je me suis retrouvé devant un juge avec deux autres convertis. On nous a donné le choix de retrouver la liberté en renonçant au christianisme et en adhérant à l’Islam. Dans mon faible état, je voulais renoncer, mais mes frères solides à mes côtés ne me le permirent pas. Ils ont prié que nous soyons dans la même cellule et Dieu nous l’a accordé, pour que j’aie ma première étude biblique. Nous avons été condamnés à mort, un chaque vendredi; j’allais être le dernier. J’ai assisté aux deux vendredis où mes braves frères en Christ ont quitté cette terre pour être dans les bras de Jésus.

Le 8 février 1985 allait être le jour de mon exécution. Je me suis réveillé au son de la ville qui était bombardée par la Libye. Dans le tumulte, je me suis retrouvé libre et courant vers la vieille dame dont la bravoure avait été d’être brûlée pour sa foi en Jésus, ce qui m’avait conduit ultimement vers Christ. Elle est ainsi devenue ma mère et je suis devenu son fils, me nommant désormais Wagdi Iskander. Dieu avait orchestré les événements au-delà de mon entendement; il m’a conduit au Prairie Bible Institute à Three Hills, en Alberta, et a mis une passion dans mon cœur pour les musulmans perdus qui ont besoin de Jésus comme leur Sauveur.

S’il y a des musulmans autour de vous, ils ont besoin d’amour, de grâce et du pardon de Dieu. J’aimerais vous encourager en vous disant que pour accomplir quoi que ce soit, il faut du temps et des efforts. Priez et dépendez du Saint-Esprit pour vous guider et vous rendre capables d’agir.

  • Établissez une amitié réelle.
  • Posez-leur des questions sur leur famille et leur culture et écoutez attentivement et réellement.
  • Ne soyez pas sur la défensive ou animés d’un esprit de contradiction, mais dites plutôt : « voilà qui est intéressant ».
  • Démontrez du respect pour leur culture et leur comportement.
  • Présentez la Bible au moyen d’histoires. Demandez-leur ce qu’ils croient qu’un passage veut dire. Le Sermon sur la Montagne m’a été fort utile et a conduit bien des gens à se convertir.
  • Ne les pressez pas ou ne soyez pas surpris s’ils posent la même question encore et encore. Souvenez-vous d’où ils viennent, de leur histoire et de leur culture.

En fait, la première et la dernière question doivent porter sur Jésus-Christ et qui il est. Une amitié véritable est le seul moyen d’y parvenir…

 

Wagdi Iskander a servi auprès de plusieurs missions, a été le pasteur de plusieurs Églises arabes, évangélise les musulmans et équipe d’autres chrétiens pour faire de même. Il vit en Alberta avec sa famille. Dans le cadre de la conférence Mission 48 à Banff, Wagdi a animé un atelier intitulé : Comprendre la mentalité musulmane. Wagdi a aidé les participants à mieux comprendre les musulmans et comment utiliser la Bible pour les atteindre. Il a évoqué les objections des musulmans au christianisme et il a offert des réponses concernant ces objections. Il a discuté de la réalité musulmane en Amérique du Nord. Vous pouvez écouter l’enregistrement de cet atelier en cliquant sur le lien suivant : http://www.fellowship.ca/qry/page.taf?id=288 (en anglais seulement).